Hello les Belles ô ! Aujourd’hui je souhaite vous présenter une créatrice de mode que vous prendrez plaisir à découvrir ou redécouvrir. Il s’agit de Nelly, créatrice de la marque Juneshop. J’ai le plaisir de partager avec vous mon entretien avec elle. Et pour les plus chanceuses, la possibilité de gagner des places pour le prochain défilé qui aura lieu le 13 Juin à la Bellevilloise à Paris* !
Aude : Bonjour Nelly.
Nelly : Bonjour.
Aude : Vous êtes la créatrice de vêtements et accessoire pour femmes Juneshop, parlez-nous de votre parcours et de la façon dont commence l’aventure.
Nelly : Alors je suis née Cameroun, arrivée en France toute petite, dans la valise des parents. Ensuite j’ai fais des allers retours entre la France et le Cameroun. J’ai commencé mes études supérieures en France –du coup je suis restée en France– mais mes parents sont retournés définitivement au Cameroun. Et c’est pendant mes études, des études littéraires donc rien à voir avec la mode, que j’ai commencé à créer des vêtements. L’aventure Juneshop a commencé au tout début en 2001, j’ai lancé la marque avec une amie, on était deux. Et on s’est désassociée en 2009, et j’ai continué l’aventure toute seule. Mais le point de départ c’était le fait de constater que je ne trouvais pas de vêtements qui utilisaient le tissu africain, notamment le wax, tout en étant adapté à ma vie de jeune femme en France, à Paris, enfin en occident.
Aude : Oui des vêtements de tous les jours aussi, pour aller au travail, aller en cours…
Nelly : Voilà, pour aller au travail, à la fac, pour sortir. Des vêtements qui utilisent le tissu africain mais qui en même temps soient modernes et adaptés à la vie ici, parce qu’au pays c’est les boubous, les cabas enfin les robes traditionnelles, mais qui ici n’avaient pas de sens.
Aude : Vous proposez un concept qui est celui du « Melting mode », expliquez-nous ce que cela signifie et en quoi cette valeur fait-elle sens ?
Nelly : « Melting mode », cette expression je l’ai prise à partir de l’expression « melting pot » pour résumer un petit peu tout ce qui était création d’une identité à partir de mélange, sans pour autant perdre les identités d’origines. Donc pour moi, ça allait très bien avec mon parcours, élevée entre la France et le Cameroun. Je voulais traduire ça dans ma perception de la mode et du prêt à porter. C’est un mélange que j’essaie de faire harmonieux, entre l’Occident et l’Afrique, une rencontre en fait.
Aude : Quel regard portez-vous sur la femme et quelle image souhaitez-vous véhiculer et transmettre à travers vos créations ?
Nelly : Par rapport à la femme, je fais des petites séries du 34 au 50.
Aude : Ca c’est déjà une bonne compréhension du corps féminin !
Nelly : Voilà, tout à fait. Pour moi c’est très important d’habiller toutes les morphologies, enfin un panel large de morphologies. Ca traduit aussi ma conception de la femme, c’est-à-dire ne pas avoir une image unique de la femme, de ce que le corps de la femme doit être. Moi, je dis toujours que c’est aux vêtements de s’adapter au corps de la femme et non pas à la femme de s’adapter au vêtement.
Aude : D’accord, donc au vu de cette diversité du corps (des corps) de la femme, il est nécessaire que le vêtement corresponde aussi à cette réalité.
Nelly : Voilà. J’ai, comme beaucoup de femme ici en occident, constaté qu’il y a quand même un gros diktat au niveau de ce que la femme devrait-être, et je ne parle même pas de l’aspect moral des choses, mais ne serait-ce que de l’aspect esthétique. La taille qu’on devrait faire, le poids, les formes qu’on devrait avoir, alors qu’il y a une variété de femme incroyable et c’est une richesse ! Moi étant originaire d’Afrique, les critères de beauté ne sont pas du tout les mêmes. On va dire qu’une belle femme, s’il faut caricaturer, devrait faire au moins un 44, ici c’est le 36.
Aude : Voilà ! (Rires)
Nelly : Et en plus, ce n’est pas quelque chose qui corresponde à une réalité parce que les femmes qu’on voit dans la rue partout, n’importe où, sont plus proches du 40 que du 36 de manière standard, s’il faut standardiser les choses. C’est pour ça que j’essaie vraiment de faire des séries du 34 au 50, et de proposer dans mes modèles des choses variées. Autant du court, que du mi long, que du long, des formes près du corps, des formes un peu plus évasées pour essayer de satisfaire à différentes morphologies. Donc moi l’image que j’ai de la femme c’est une femme qui s’assume quelques soient ses formes, qu’elle soit très fine, parce que les femmes fines ont aussi des problèmes, il n’y a pas que les problèmes liés au fait de se trouver trop grosse, il y a aussi des femmes qui trouvent qu’elles n’ont pas suffisamment de formes, donc dans les deux sens il s’agit de mettre en valeur le corps de la femme quel qu’il soit, en faisant des vêtements qui s’adaptent à la femme et pas l’inverse comme je disais.
Aude : Des vêtements qui puissent correspondre à quelque chose de moderne, de contemporain.
Nelly : Tout à fait. Je travaille sur de la pièce unique. Je fais faire des séries, par exemple une robe, mais elle va être déclinée dans des tissus différents à chaque fois. Donc chaque femme a vraiment son vêtement. Avec le wax, les tissus africains sont très expressifs, et d’une couleur à l’autre, d’un motif à l’autre, ça ne donne pas du tout la même chose, même si c’est le même modèle.
Aude : Quelles sont vos influences et inspirations ?
Nelly : Alors mes influences, moi au niveau de la création je suis vraiment assez terrienne, donc ça va vraiment être la vie, les gens que je rencontre, un film que je vais voir, une musique, une expo, enfin quelque chose qui me touche directement. Moi je ne regarde jamais les défilés de mode par exemple. Parce que je n’ai pas envie d’avoir l’œil perturbé quand je crée. Je n’utilise pas non plus les cahiers de tendance. Si on me dit aujourd’hui c’est le rose qui va être la couleur de cet été, je ne suis pas ça. Alors c’est surement parce que je ne viens pas du milieu de la mode, et que je suis autodidacte, ce qui me permet, je pense, d’avoir une certaine fraîcheur et de garder l’esprit ouvert.
Aude : C’est aussi peut-être une forme de liberté quelque part ? De ne pas se conformer à quelque chose qui soit dans l’air du temps tout en proposant des choses qui plaisent aussi.
Nelly : Tout à fait. Oui. Après j’ai une sensibilité par rapport à la mode, ça c’est sur parce que c’est ce que je fais, mais en même temps il y a des choses qui sont intemporelles aussi. Des choses cycliques qui reviennent tout le temps. Moi ce que j’aime bien aussi c’est de faire des basics dans mes collections. Mais comme je le disais, le tissu wax est tellement expressif qu’en lui même il se suffirait presque.
Aude : En quoi cela est-il important que les modèles de votre lookbook incarnent et représentent différents types de beauté ?
Nelly ; Alors c’est très important pour que mes clientes puissent s’identifier au modèle. Par exemple moi mes modèles, à part pour les défilés couture là j’ai des critères sur lesquels je n’ai vraiment pas de choix, souvent les mannequins ne sont pas des femmes, se sont des jeunes filles, elles ont toutes moins de 18 ans. Mais dans tout ce que je présente sur ma boutique en ligne, sur le site internet, je prends vraiment des femmes. Autant j’ai des modèles qui font du 48 comme des femmes qui font du 34. La plus petite doit faire 1M50, la plus grande 1M80. En fait j’essaie d’avoir de belles femmes, en tout cas moi je les trouve belles. Mais auxquelles les clientes peuvent s’identifier, parce que quand on voit porter par un mannequin de 1M80, taille 34, 15 ans, quelque chose, on ne peut pas s’identifier à ça. On se dit « Oui à elle, ça lui va bien parce qu’entre guillemet, c’est un peu un porte manteau, mais à moi qui ai telles formes, telle taille, tel poids, ça n’ira pas ». Donc pour moi c’est très important d’avoir des femmes réelles qui portent le vêtement.
Aude : Vos collections sont éclectiques, colorées, chic, ultra féminine et glamour, comment réussissez-vous à combiner tous ces éléments ?
Nelly : En fait je fais beaucoup d’écoute avec les clientes. J’essaie d’être très accessible, à ce niveau là. Ecouter ce qu’elles veulent, ce qu’elles aiment, les remarques qu’elles me font. Parfois j’ai un modèle qui va évoluer parce qu’on va me dire « ah bah là j’aurais bien aimé des poches, où là le décolleté je le souhaite de cette façon, ou comme ça ». Je reste très ouverte par rapport à ça. Je pense que c’est vraiment le contact direct avec les clientes, avec leur demande. Voilà, j’ai un panel assez large de clientes, ça va de la jeune fille à la femme. La cliente la plus âgée que j’ai à 80 ans, ce ne sont pas les mêmes exigences selon les étapes de vie. Que se soit en terme de modèle, de coupe, etc. J’essaie de proposer des choses variées, mais toujours très féminines. Des vêtements dans lesquels on se sente belle, et confortable.
Aude : Enfin, que faire pour vous commander une création, pour une occasion ou pour la vie de tous les jours d’ailleurs !
Nelly : Alors sur le site en ligne il y a des créations mises en vente. Il y a un e-store. Je reçois aussi tous les jours pour celles qui sont en région parisienne ou sur Paris, donc dans le 19ème, pour venir voir, ou essayer les créations. Et puis je fais aussi maintenant un service de sur mesure, c’est-à-dire que vous pouvez choisir votre modèle – j’ai toutes les collections en ligne sur le site – votre tissu. Soit vous m’envoyer les mesures, si vous n’êtes pas en région parisienne, je vous envoie un gabarit qui vous permet de les prendre, soit vous venez directement, je prends vos mesures, je vous envoie un panel de tissu, vous choisissez votre tissu, votre assemblage, et le modèle est réalisé. Alors moi je fais tout ce qui est prototype mais les modèles sont réalisés au Cameroun, parce que je travaille avec le Cameroun. Tous les tissus, toutes les matières premières viennent de la bas et sont produites la bas, j’ai un atelier à Yaoundé, et donc c’est eux qui réalisent les vêtements sur mesure.
Aude : D’accord ! Donc c’est vraiment, même au niveau de la création, un pont et un échange aussi entre ces deux espaces culturels qui vous inspirent, ça fait sens aussi à ce niveau là.
Nelly : Exactement. Ma démarche ce n’est pas uniquement d’exporter la culture africaine, mais aussi que ça puisse créer, même à ma petite échelle, une activité économique sur place, enfin que se soit un vrai échange et pas seulement une vitrine.
Aude : Très bien. Et bien merci beaucoup !
Nelly : Merci à vous.
*Pour participer au défilé:
Il vous suffit de commenter l’article en indiquant vos prénoms, identifiants Facebook, Twitter et Google+ puis de le partager à un maximum de vos contacts par mail (en m’ajoutant en copie à belleoplurielle@gmail.com) et/ou via les réseaux sociaux, puis de contacter la créatrice de Juneshop qui m’a gentiment proposé de vous permettre d’assister à ce bel événement mode à invitation@juneshop.net. Objet du mail : « Demande d’invitation Belle ô pluri’elle ». Merci à elle !
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